Kevin Nivek Posté(e) le 15 mai Share Posté(e) le 15 mai La très rare artiste BD Anne-Sophie Servantie nous a fait l'immense plaisir de répondre à nos questions pour la sortie de son dernier ouvrage : La première couleur fut le noir, paru chez Mosquito. Vous êtes donc une artiste aux multiples casquettes, architecte DPLG, peintre, romancière, dessinatrice de BD, que de talent ! Pourquoi avoir abandonné l’architecture par contre ? J’adore la conception, je déteste la construction. Le monde est déjà assez sale sans que je commette quelque péché de prétention constructive. Et je suis depuis l’enfance une crabouilleuse, mes doigts ont sans cesse besoin d’écrire, de gribouiller quelque chose, de dessiner, de raconter car ce sont vraiment nos doigts qui racontent. Vous avez donc emprunté une voie plus artistique avec de la peinture et de la littérature, c’était une façon de vous « recréer » ? Le premier choix était de devenir artiste. Non, je suis artiste profondément à l’intérieur, il m’est impossible de faire autre chose de ma vie. L’architecture fut un apprentissage fabuleux et une tentative inconsciente et impossible de m’intégrer, de faire comme tout le monde. Pour mon diplôme d’architecte, j’ai pris une voie radicalement différentes des projets traditionnels en écrivant un roman de SF, mêlé à un mémoire théorique sur le rôle de l’inconscient dans la conception architecturale, le tout inspiré du lieu conçu par Régis Loisel (invité d’honneur de mon jury) dans le Temple de L’oubli. Ensuite j’ai eu un poste dans une grande agence à Paris, de mon bureau j’avais une vue sur l’Arc de Triomphe… et un jour j’ai tout lâché. C’était impossible pour moi de continuer, je ne savais pas ce que je faisais là. Avec la sortie de cet album, La première couleur fut le noir, on apprend ce terrible passé vous concernant qui a forcément eu un profond impact sur votre vie adulte et les voies choisies. Vous sentiez que c’était le bon moment pour exorciser ces passages de votre vie ? La lourdeur de l’amnésie post-traumatique est justement le vide dont on semble construit à l’intérieur, alors que tous les souvenirs sont là, intacts, attendant juste d’être retrouvés, traités, analysés. Je n’ai pas choisi d’exorciser, il y a eu juste un moment où mes doigts ont trouvé le chemin pour le faire, lentement, pas après pas, case après case. On remarque dans la BD que vous avez baigné dedans dans votre jeunesse, le monde du 9ème art est resté ancré en vous ? Je vous pose la question car le lieu où se trouvait ces albums (source d’évasion) pourrait être associé à des souvenirs nettement moins agréables. Vous auriez pu tout aussi bien renier ces lectures en symbole d’un passé douloureux. Quand j’étais enfant, les bandes dessinées étaient à la fois dans toutes les bibliothèques de la famille et à la fois interdites sauf quand on était malade. Là, mes parents sortaient le « carton aux bandes dessinées ». Ça tombe bien, je suis gravement malade depuis dix ans, je peux enfin me consacrer à ça ! Seulement 2 BD dans votre bibliographie, cette oeuvre ainsi que La dernière couleur fut le rouge, parue en 2019 chez Grrr.Art édition. Pourquoi autant de temps entre les deux et surtout pourquoi uniquement 2 ? 🙂 Devrais-je dire que je suis une femme, plus très jeune ? À l’époque les portes des éditeurs ne nous étaient vraiment pas très ouvertes ! Combien ai-je envoyé de dossiers au fur et à mesure des années, sans cesse refusés ? Je suis surtout devenue essentiellement peintre, j’ai même arrêté l’illustration rapidement. Puis j’ai eu une seconde histoire de vie passionnante, sur laquelle il faudrait que je prenne le temps d’écrire d’ailleurs. Je suis devenue magnétiseuse et hypnothérapeute pendant de longues années. Dans cette seconde période de vie, j’ai rencontré un homme extraordinaire avec lequel j’ai eu la chance de vivre 10 ans d’un amour merveilleux jusqu’à sa mort il y a deux ans. Et il avait une telle vie qu’il m’a paru impossible de ne pas la raconter et là, la bd s’est de nouveau imposée à moi. On aimerait voir votre trait sur d’autres histoires, plus « légères » à vrai dire. Je pense à de la Fantasy ou un polar. Pourriez-vous essayer ce style de parution ? Quels sont vos projets justement ? Je suis en train de reprendre un projet très ancien, refusé x fois par divers éditeurs et qui me fait toujours vibrer, une belle histoire plus « légère ». Il est sans doute temps que je la laisse émerger. Allez-vous poursuivre votre collaboration avec Mosquito ? Sûrement avec plaisir, si ce nouveau projet plait. Au nom de toute l'équipe 1001BD.com, nous vous remercions Anne-Sophie 🙂 1 Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
The_PoP Posté(e) le 15 mai Share Posté(e) le 15 mai Super interview, j'adore. Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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