Aller au contenu
  • S’inscrire

32 histoires (optic nerve)


Monfreid...
 Share

Messages recommandés



32 histoires - la série complète des mini-comics Optic Nerve
D'Adrian Tomine
aux éditions Seuil




Résumé : En 1991, Adrian Tomine éditait à compte d'auteur le premier numéro d'Optic Nerve. Ces trois feuilles de papier photocopiées et vendues un dollar passèrent largement inaperçues. Au cours des trois années suivantes, Optic Nerve évolua à une vitesse sidérante : le dessin et l'écriture progressaient à chaque nouvelle histoire et au numéro sept les ventes atteignaient 6000 exemplaires. Ce sont ces premières éditions rares, réunies de façon inédite en un seul volume, que propose 32 histoires.


Avis : Il n'est jamais facile de parler des ouvrages dont la préface est assurée par l'auteur lui-même, d'autant plus lorsqu'elle est de qualité. Néanmoins la lecture de ce recueil suscite tellement d'émotion qu'il semble important de laisser une trace de notre ressentie personnel.

Adrian Tomine est un auteur particulier, en proie à des troubles sociaux, sans doute à de l'angoisse, il ne semble pas prendre du plaisir dans les rapports affables et courtois qui parsèment nos vies. Malgré cela ou plutôt, grâce à ça, il parvient à nous dépeindre un portrait du quotidien troublant de vérité. A croire que l'humanité se cache dans les détails.

Tomine œuvre par ricochet, au début, il ne cherche juste qu'à se "défouler", qu'à exprimer un trop plein. Quelques strips nous racontent ses rêves ou des anecdotes sommes toutes banales. Il faut bien l'avouer, il n'y a rien de transcendant ou de fascinant dans ces planches de jeune homme un peu paumé. En dépit de cette vacuité, le charme opère, on se prend de sympathie pour ces mésaventures d'un jour et ses frustrations du quotidien. On ne se reconnaît vraiment en l'autre que lorsqu'il partage nos malheurs.

Bien sûr des premières histoires se dégage un ton acerbe et noir. Comme le trait qui est encore trop hachuré pour masqué des inaptitudes et des fragilités, les thèmes sont appuyés et trop incertain pour vraiment nous toucher, on lit avec plaisir ces saynètes reflétant le monde ténébreux d'un post adolescent en mal de reconnaissance.

La différence viendra du travail que va fournir l'auteur. Nombre de jeunes gens se sont essayés à l'art comme défouloir opportun de leur inassouvissement et de leur insatisfaction envers le monde. Tout le monde à connu un chefaillon tyrannique, dont la seule parole suivie à faire remonter en nous la haine la plus noire. Rien de bien original dans tout cela. Dès le début pourtant, en filigrane, on perçoit une narration différente des autres récits tourmentés qui jalonnent ce genre. Une distance entre le sujet et l'auteur, ce dernier prenant du recul sur les événements pour les transformer sciemment en récit. Cette "froideur" de ton, va finir par apparaître de plus en plus de récit et finir par devenir partie intégrante du style de l'auteur.

Certaines apparitions un peu forcées de l'autofiction continueront de jalonner les étapes de cette progression. De moins en moins envoûté par le souci de "coller à la réalité", Tomine pourra se concentrer au réalisme et dépasser des considérations pour le moins puériles. Cette maturation nous est donnée à voire tout au long de ces histoires. Le recul un peu orgueilleux, va céder la place à un sens aigue du détail qui fait mouche, le trait va se préciser pour aller lui aussi à l'essentiel. La narration va aller en s'affinant, au final le trait va se transformer en scalpel.

Ce découpage du monde en situation marquante, n'est pas un exercice facile. Mais Tomine y prend plaisir (il le dit lui-même), et ça se sent. Ce qui semble motiver cet engouement c'est la possibilité de changer le rythme et donc la perception des événements, de leur donner une signification, un poids différents. Les premières histoires sont surtout axées sur le "point de vue des personnages", on y ressent un humanisme certain, une envie de "bien faire", de bien écrire. Les personnages sont d'ailleurs à la merci de l'histoire. Au fur et à mesure que le trait va prendre de l'assurance, les protagonistes vont finir par se démarquer de cet attachement à l'histoire, par vivre par eux-mêmes. Le dessin seul, va réussir à rendre la densité des personnages ainsi que la profondeur de leurs sentiments. Cette consistance va s'exprimer par des "petits rien" qui souvent auront pour but de mettre en évidence, le vide qui nous sépare les uns des autres.

Le traitement de la solitude rappelle fortement celui de ghost world, elle donne lieu à une dépression latente, mais aussi à des pulsions de vie qui s'expriment brusquement et parfois violement (pour preuve cet employé qui tabasse un client parce qu'il le rend triste…entre autre). La narration se libérant du poids des personnages, elle va pouvoir devenir plus délétère, plus symbolique et forcément plus émotionnelle et intense. Des récits comme "fumée" ou "joyeux anniversaire" sont révélateur de ce penchant du récit que l'on retrouvera dans "Blonde platine".

Le graphisme se fera alors plus direct, ne cherchant à rendre que l'essentiel, se passant aisément du superflu pour mieux entrer en contact avec les sentiments du lecteur. D'un sourire amusé et un peu moqueur sur les premières histoires, on termine pris au piège de nos propres réactions. Tomine affirmant finalement sont don indéniable pour laisser au lecteur le soin de se faire sa propre idée de ce qu'il vient de lire. Pas de moral, pas de raison; juste la précision parfois cruelle et parfois tendre d'un regard acéré.

Un recueil inégal, mais c'est dans sa nature, qui ravira les amateurs de l'auteur qui pourront y découvrir plus de nuances, et permettra aux autres de pénétrer plus facilement son univers si particulier.

Bonne lecture
Monfreid…
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Je l'aurai noté "très bien" cet album.
Je ne connaissais que Blonde Platine de Tomine et ce recueil m'a permis de mieux connaitre l'auteur et de voir qu'il avait une palette graphique assez large. L'emploi d'un style tès cartoon sur l'histoire de la suppression du sommeil par exemple. J'ai beaucoup apprécié les récits autobio, notamment à cause de l'humour employé qui lui permet d'avoir une certaine distance quant à sa propre représentation. Une mention spéciale à l'histoire sur son allergie. De plus cet humour semble présent dès le début ( l'histoire du dos cassé ).
En fait je pensais que Tomine était plutot un type triste et ruminant des idées noires. Mais en fait c'est un gars bourré de talent.
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

je suis d'accord sur l'humour!

mais je ne le trouve pas drôle!

enfin oui et non!
c'est à dire que ça me fait rire, par compassion. j'ai pas l'impression qu'il ai construit les planches drôles pour faire rire, pour mettre un peu de dérision dans son cynisme.

Du coup l'humour en question fonctionne mais ne m'émeut (ou autruche c'est comme on veut) pas autant que le talent qu'il a pour rendre les silences et les blancs entre les gens, le vide de nos vies. d'ailleurs je ne trouve pas ça forcément triste, ça mine le moral c'est certain, mais ensuite on goûte plus les choses agréables.

d'ou juste "bien"

il me semble aussi que j'avais vu une bd d'adrian tomine chez delcourt une fois y'a longtemps ça doit pu être dispo...mais j'aimerais savoir si c'est inédit ou non ?

quelqu'un à des infos là dessus?

bien à toi,
Monfreid...
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

CITATION(Monfreid...)
c'est à dire que ça me fait rire, par compassion. j'ai pas l'impression qu'il ai construit les planches drôles pour faire rire, pour mettre un peu de dérision dans son cynisme.


Exact, mais c'est ce qui me touche, me rapproche de lui. Faire de l'humour devant la fin du monde, pour supporter la vie et ses aléa c'est tout à fait moi.

CITATION(Monfreid...)
Du coup l'humour en question fonctionne mais ne m'émeut (ou autruche c'est comme on veut) pas autant que le talent qu'il a pour rendre les silences et les blancs entre les gens, le vide de nos vies. d'ailleurs je ne trouve pas ça forcément triste, ça mine le moral c'est certain, mais ensuite on goûte plus les choses agréables.


D'accord mais c'était déjà présent dans blonde platine. Moi ce qui m'a plu ici c'est la découverte d'un Tomine "élargi".

CITATION(Monfreid...)
il me semble aussi que j'avais vu une bd d'adrian tomine chez delcourt une fois y'a longtemps ça doit pu être dispo...mais j'aimerais savoir si c'est inédit ou non ?

quelqu'un à des infos là dessus?.




Ce livre est malheureusement épuisé. Si qq'un veut s'en débarasser...
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

je comprend bien ton rapport à l'humour mais je sais pas, je trouve qu'il est encore un peu pataud, dommage qu'il n'en est pas fait plus :roll:

je pense qu'il pourrait en fait de grandes choses

vi, c'est vrai que c'est déjà présent dans blonde platine, mais j'aime vraiment ça chez lui, je trouve qu'il capte bien les personnalités et que les détresses ou les vides affectifs qu'il dépeind ne sont jamais les mêmes, je trouve ça fascinant ça façon d'y arriver en fait!

pour le bouquin si en plus il y en a un deuxième exemplaire biggrin.gif
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Rejoindre la conversation

Vous pouvez publier maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous avez un compte, connectez-vous maintenant pour publier avec votre compte.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

 Share

×
×
  • Créer...