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Dictionnaire de la BD par Filippini


Monfreid...
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Dictionnaire de la bande dessinée
de Filippini
aux éditions Bordas



Résumé : réedtion du dictionnaire de la bande dessinée édité en 89 par Filippini. Véritable "légende vivante" du domaine, l'auteur nous livre ici un nouvel exemple de sa démarche toujours en quête de perfection.

Avis : Il en va des dictionnaires, comme des cartes routières, ça fait partir du nécessaire de voyage du premier baroudeur venu. Reste que traîne au milieu de quelques sentiers champêtre, au pied d'une crête tentatrice, ou niché au creux d'un vallon. La carte en question nous apparaît comme superflu et très dispensable. Il en va souvent de même, pour cet énorme parure/outil dont aime à se parer l'amateur averti.
Souvent ne voulant pas dire toujours, la production s'amplifiant (démesurément), il est temps de causer de la sortie récente de ce petit bijou, qu'est le "dictionnaire de la bande dessinée" par M Filippini.

Considérations d'ordre générale sur ce genre d'ouvrage

Autant le dire tout de suite, les pavés, les sommes, les histoires de, les compilation de savoir, les référents ultimes m'énervent. Leur exhaustivité affichés me hérissent le poil, m'horripile le cortex, assomme la libido du voyageur qui sommeille en moi, bref les dicos prennent souvent la poussière chez moi.

Ce qui me plait, et m'intrigue dans les cartes c'est que tout y est "terra incognita", qu'elle sont promesses de voyages. Forcément, sur place "rien ne sert à rien", et le plaisir vient de la perdition en quelques lieux nouveaux et "non clairement indiqués".
La carte, à la décence de pouvoir se faire discrète, de se faire oublier de nous, pas toujours mais quelques fois, ce qui est amplement suffisant.

Le dictionnaire lui est pesant, même lorsqu'il est "de poche", il vous la déforme la poche en question. Sa complétude est insolente, ses raccourcis irrévérencieux, sa perfection terni l'objet, injurie la rétine (définir "aboulie" en quatre mot, si ce n'est pas faire preuve d'insolence ?). Le dictionnaire est pédant, il à l'outrecuidance de vouloir vous remettre à votre place.

En ces temps de ventes abondantes l'amateur novice en bd à donc l'embarras du choix entre les "guides", les "indispensables" et autres "nécessaires".
Ce qui est horripilant pour l'amateur éclairé, qui ne doit son parcours qu'à sa seule dévotion et à son écoute patiente, c'est l'aspect "hé! Client achètes toi une culture prête à l'emploi pour pas cher!", de quoi briller en société. Là où le néophyte perçoit une bonne aubaine, l'amateur perçoit la contre façon, l'abus du "bon filon".
Le profane ne sera que faire d'un dictionnaire exhaustif, tandis qu'il deviendra "cultivé et creux" au contact des conseils "définitif" de la plupart des guides "clefs en mains".
Le gourmet lui sera blasé des parcours initiatiques pour grand débutant, qui le laisseront de marbre; tandis que les dictionnaires "standard" ne lui offriront aucunes envies nouvelles, aucune sensation forte.

Et je ne parle pas des textes (plus ou moins gros) qui sous prétexte de vous "initier", de vous "mettre dans le bain", bref de vous dire de quoi qu'on cause; vous estampille le ciboulot de milles anecdotes, de milles recadrage socio-comportementaliste, en guise d'histoire de l'art.

Le féru d'histoire y trouvera son compte, à lui cependant d'inventer les règles du jeu de pistes.

Le nombre hallucinant de sorties dans ce domaine (proposant toute un schéma essayant de rendre la "vitalité" artistique du moment, le bouillonnement culture etc) ne cache rien, et mettrait plutôt en avant les lacunes sur la question, amplifiant du même coup les attentes des amateurs.

Et puis ….


C'est comme tout, il suffit de la bonne démarche pour se perdre sur la meilleure des cartes et en dévoiler le potentiel.
Il s'agit de la bonne personne au commande, pour faire d'un dictionnaire un véritable livre de chevet.

M Filippini, n'est pas n'importe qui, c'est un "expert" renommé, une sommité, un concentré de connaissance, le respect des autres forment son sillage…gageons qu'il sait faire fi de ces éloges au vu du résultat de son travail.

Son nom doit résonner pour nous comme une récompense. Les trois pavés parus chez Glénat, faisaient le tour de la question, où plutôt le "détour" au vu de la lecture romanesque qu'ils supposaient. Ce tome unique se veut plus digeste, plus facile d'accès, il n'en sera pas moins "bon" pour autant, pas moins ambitieux et surtout pas moins utile et prometteur.

Déjà, il ne cherche pas à briller par son souci d'exhaustivité. Exit la grosse parenthèse sur l'univers manga, exit les rajouts à la va vite, les historiques en forme de "livres à lire". M Filippini, en chercheur aguerri, pose d'emblé les limites : un seul dictionnaire ne saurait venir à bout d'une telle tâche. Cette position est tout à son honneur, quelle carte proposerait sous un format praticable un compte rendu de l'ensemble des chemins de randonnés du monde ?
Le lecteur de ce volume sait qu'il n'aura pas affaire à des approximations, l'auteur ne parlera que de ce qu'il connaît.

Son propos ? la bande dessinée populaire.
Et quitte à traiter d'un sujet, autant le faire avec parti pris, ça évitera de pêcher par excès de prudence.
L'auteur nous propose donc, de rentrer dans le monde de la bande dessinée, en suivant le chemin de ses héros.
Tout d'abord de ceux en papier, 1 000 créatures vont surgir des pages pour nous offrir les aventures. Nul doute qu'il y a là un choix, c'est la marque d'une sélection. Peut être est ce là, une forme d'élitisme ? Reste que cette désignation, est toujours dicté par le "bon goût" et le "bon sens", pas de trace de science infuse et absconse. Au contraire, le questionnement règne ici, l'auteur ne se pose pas en "garant" de la vérité et du chemin à parcourir, plutôt en lecteur, féru de plaisir, de bon mot, d'histoire forte et sensationnel, d'émotions, de nuances, au fil des pages c'est l'envie qui prime, l'envie de découvrir et de faire partager.

Le point de vue est noble, en assumant sa partialité Filippini tourne le dos aux néo-prophètes, aux chantes des culture fast food. La clarté et de rigueur, on sait où l'on va.
Chacun des héros à droit à un résumé clair et succinct de son parcours (ni trop, ni trop peu d'informations), une contextualisation nécessaire. Rien d'exceptionnel pour un dictionnaire certes, reste que la somme de travail et de méthode est au rende vous. Vient ensuite la cerise sur le gâteau, la mise en forme de "l'opinion".

Loin des définitions déterminantes qui agissent "par principe", l'auteur se régale à construire en quelques lignes tout un univers en devenir. Rendre compte de la force et des limites d'un héros : impossible. Que cela ne tienne, Filippini relève le pari et avec panache encore. Il contourne la sacro sainte règle de l'indifférence pour nous donner son avis. Entendons nous bien, il ne se permet pas de réduire une œuvre à quelques adjectifs puiser au cœur d'une somme synonymique, il n'œuvre pas à la digestion évidente du travail d'autrui. Il esquisse une opinion, donne corps à des mots, il est acteur de la lecture, ce point de vue singulier Filippini le doit au fait que jamais il ne sort de sa position initiale qui est celle d'un lecteur.
Contrairement à nombres d'autres auteurs, celui-ci hante son ouvrage quoi de plus franc et de plus efficace ?

Si on ajoute à cela un travail de recherche iconographique (chaque entrée et servie d'une illustration idéale rien que ça, à la fois synthèse de l'œuvre autant qu'exhortation à la découverte) colossale, il ne nous reste plus qu'à nous installer le plus confortablement du monde pour déguster cette véritable "invitation au voyage".

Pudiquement la partie "auteur" sait se faire discrète sur le "style" de ses derniers. Point de jugement ou d'avis superflu sur ses artisans de l'imaginaire, des informations essentielles, historiques, des points de repères dans les œuvres et dans les publications, les "moments" important de la carrière, guère plus. En faisant ce choix (encore un) Filippini permet au lecteur d'en savoir plus, sans que l'auteur ne devienne pour autant une bête de foire.
"Juger" le héros, l'œuvre n'est pas juger l'homme qui l'a créé, la créature n'est pas assimilable au créateur.
L'anecdotique "people" n'est pas à l'ordre du jour, et on sent qu'en véritable érudit à l'esprit "gamin", Filippini préférerait consacrer un volume entier à chacun de ses artistes. Là encore la noblesse est présente.

On l'aura compris la particularité essentielle de ce dictionnaire et de proposer au lecteur de faire ses propres choix, très vite la compulsion se transformera en flânerie au gré des envies, de subtils glissements s'opéreront entre les entrées, pour mieux nous perdre.

Un ouvrage de "référence" ne cherchant jamais à la devenir, faisant passer avant tout le plaisir du lecteur et ses différentes facettes, un jeu de piste et de détour permanent pour le plus grand plaisir des lecteurs.
L'un des meilleurs ouvrages du marché, dont on ne pourra pas facilement se décoller la rétine.
A ranger dans un endroit facilement accessible, pas très loin du dictionnaire Goscinny.

Bonne lecture
Monfreid…
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