Aller au contenu
  • S’inscrire

L'Orme du Caucase


Monfreid...
 Share

Messages recommandés



L'Orme du Caucase
de Taniguchi et Utsumi
aux éditions Casterman (collection écritures)




Résumé:Chacune des nouvelles de ce recueil retrace une tranche de vie. Avec délicatesse, et par petites touches, Jirô Taniguchi campe des portraits de jeunes, de vieux, d'enfants à un moment difficile de leur existence. Comme la petite Hiromi, confiée provisoirement par sa maman à ses grands-parents, qui est terrorisée à l'idée d'être abandonnée. Ou comme M.Harada qui ne se résout pas à faire couper cet orme si beau et aux couleurs si subtiles, au simple prétexte qu'en automne, ses feuilles tombent dans la cour des voisins. Ou encore M.Iwasaki qui, par le plus pur des hasards, retrouve sa fille de 25 ans qu'il avait quittée alors qu'elle était encore bébé. Il finit par l'aborder, mais n'ose pas lui révéler son identité.


Avis:Le bruissement de votre mouchoir reviendra longtemps hanté vos mémoires.
La pureté n'est certes plus de ce monde, mais il est des fois où une œuvre s'en approche si tendrement que l'on se prend à de nouveau y croire.

Cet opus ce compose de 8 nouvelles toutes plus émouvantes les unes que les autres. Il conviendrait d'avoir une approche exhaustive et égalitaire pour chacun de ces récits, mais en plus de retarder le moment de votre lecture cela risquerait de déflorer un peu trop profondément vos émotions; c'est pourquoi on va se contenter d'effleurer les thèmes principaux de ce recueil.

Enfin du thème principal devrait-on dire, car la famille (nucléaire) et au cœur de ces nouvelles. Adaptées elles ne sont pas le fait de Taniguchi lui-même, mais il connaissant déjà quelques œuvres du mangaka on ne s'étonnera pas de ses choix. Encore une fois la parenté et les émotions qui en émanent sont les pierres de voûtes de toute une vision du monde. Que les lecteurs qui craignent une possible redondance du propos se rassure, il n'en est rien. Tout ici affaire de nuances, les relations humaines ne souffrent pas l'apposition de paradigme soit beau soit-il.

La première histoire( qui donne son nom à la BD) est une banale histoire d'orme, le pire étant que cet arbre ne cache pas la forêt d'imbécile qui hante nos vies. Cette présence fortuite va mettre à jour la contemplation, celle d'un vieux couple sur le monde et ceux qui les entoure. On remarquera ici toute la subtilité du dessinateur qui ne se contente pas de mettre en case, un conte zen moderne puisqu'il nous la livre sous la forme éphémère (c'est son essence) d'un haïku visuel. A méditer…


Le thème de l'enfance sera quand à lui aborder dans 4 nouvelles (Le cheval de bois, La petite fille à la poupée, Le parapluie, Dans la forêt). Il n'en sera pas pourtant galvauder ou pris comme sujet populaire et facilement lacrymale. Il s'agit de mettre en scène l'enfance de lui donner corps, autrement que par le biais d'entité moderne. Le réalisme saisissant des sentiments profonds de la petite fille du cheval de bois, ne peut que nous émouvoir tant chacun d'entre nous à lui aussi ressenti un jour cet abandon terrible qui est le sien. En même temps, il ne s'agit pas pour Taniguchi de livre un regard pessimiste sur l'enfance mais de s'en saisir comme d'un aide mémoire à nos propres émotions. A la lecture de ces quelques pages on se rend compte du nombre de choses que l'on oublie en grandissant et du mal que cet oublie peut nous faire et faire à nos proches. Heureusement certains adultes sont encore capables de discerner ces éléments.

Ces adultes sont souvent à l'image du grand père de la fille au cheval de bois ou du père de la peintre dans la petite fille à la poupée, des personnes ayant passés la quarantaine, ayant réussi, n'ayant plus rien à attendre du monde et qui peuvent enfin profiter de leur vie pour se mettre à flâner. On insistera jamais assez sur le mouvement chez Taniguchi, celui s'effectue en effet souvent en apesanteur, avec une certaine lourdeur pataude, quelque chose de presque comique en tout cas d'inadapté( un peu comme Totoro). Cette démarche hésitante, pataude et vieillissante qui n'a plus sa place dans nos sociétés modernes; c'est paradoxalement celle qui va à l'encontre des enjambés fougueuses de notre enfance (Dans la forêt ou autre). De ce fait c'est l'activité sociale, la réussite, l'abandon et le repli sur soi moderne qui nous traînent aux confins de nos angoisses…la fille du Parapluie en est un parfait exemple.

Ce dernier exemple est symptomatique de cet autre moment que nous négligeons à longueur de temps: nos souvenirs! C'est souvenir éparses et pourtant vitales que nous nous laissons le soin d'ignorer en tant utile…sans entrer dans des détails dont la symbolique nous obligerait à trop de références, on mettra en évidence que ce sont souvent des "objets" extérieurs qui permettent l'accès à ces souvenirs (peinture, parapluie, arbre etc…). Comme si la conscience ne suffisait plus ou au contraire était devenu trop suffisante avec le monde qui l'entoure, il est nécessaire de la surprendre de la mettre en face de ses tourments.
Néanmoins, loin des affres pathétiques et narcissiques des auteurs mélancoliques issue d'une branche pourrie du romantisme, Taniguchi à compris que tout cela devait d'abord être suggéré. C'est pourquoi l'auteur comprendra sans explications superflus la force d'un tableau ou l'attente qui devient cruelle pour une grand-mère nouvellement amoureuse.

On l'aura compris, tout tourne autour de nos quotidien désoeuvrés, de nos proches que l'on délaisse et de tout ces autres âmes en peines que l'on ne prend que rarement le temps d'écouter et d'aimer. Pourtant au fil d'une ballade, d'une peinture(mise en abîme de ce thème ici très présent), d'un amour ou même de la mort…si on se laisse porter par le flot continue de la vie sans vouloir le détourner à notre avantage, alors le pardon, la compréhension, les souvenirs et finalement le bonheur sont possibles.

La force de cette bd c'est de savoir nous émouvoir sans jamais tomber dans le sentimental et le facile. Titillé savamment, lentement inoculé en nous le poison de la nostalgie se répand dans nos veines. Le dessin superbe, langoureux, suave, esquissé, effilé du maître ne peut qu'être la voie vers la sagesse et la plénitude qui pourrait être la notre.
Il est des albums que l'on ne vit plus que l'on lit.

autres albums chroniqués
Au temps du Botchan 1, Au temps du Botchan 2, Quartier lointain, Le journal de mon père, Le sommet des dieux, Kaze no sho

Vu l'ampleur de cette bd d'autres viendront sans doute donner leur opinion quand à moi je me réserve quelques temps pour revenir sur des points importants
bonne lecture
Monfreid...
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites




Mon avis : On ne peut pas nier que Jirô Taniguchi est un auteur à la mode. Avec celle-ci et depuis le début de l'année, trois séries ont déjà vus le jour. Pourtant il faudrait être de mauvaise foie pour dire que son talent est inexistant. L'Orme du Caucasse ne faillit pas à la règle, cet album est, une fois de plus, très réussi.

Le scénariste, Ryuichiro Utsumi, nous offre, ici, huit superbes histoires. De là, s'en dégage beaucoup de sensibilité. La plupart de ces récits sont basés sur le thème des retrouvailles. C'est très émouvant et parfois pathétique. Vous aurez compris que l'ambiance générale de ce manga a des accents de mélodrame mais grace à la fluidité de la narration, la lecture reste très plaisante et celle-ci ne souffre d'aucunes lourdeurs. J'ai particulièrement apprécié la dernière histoire: "Son pays natal". A travers le parcours d'une jeune française qui vient d'épouser un japonais, l'auteur met en valeur les rapports difficiles entre cette "étrangère" et sa belle-mère. La source de ce conflit étant la difficulté à se comprendre et aussi le choc des cultures.
"La petite fille à la poupée" est très touchant également. On y voit ici, un père retrouvant sa fille après 23 ans. Celui-ci ne s'étant plus manifesté depuis cette époque, il est confronté au regard de sa fille qui ne le reconnait pas. Le point commun entre touts ces récits est la densité des ces personnages. Ils ont tous un passé qu'ils essayent d'oublier ou un présent qu'ils ont difficile à assumer. En bref, crédibilité, réalisme, pudeur et poésie sont les mots-clefs qui caractérisent le scénario.

Le dessin de Jirô Taniguchi n'est plus à présenter. On retrouve tous les techniques qui caractérisent son traît. Les visages très doux sont toujours aussi expressifs et les décors sont toujours aussi minutieux. En somme, son graphisme est reposant et il s'en dégage beaucoup de pureté.

En conclusion, voici un album qui m'a beaucoup plû. Ceci-dit, cela devient presque une habitude avec ce dessinateur qui nous prouve une fois de plus qu'il a beaucoup de talent. De plus, Les scénaristes avec qui il travaille ne sont jamais à négliger. On peut donc dire qu'il se crée entre eux, une osmose parfaite et ça c'est magique !
A suivre d'urgence ! :wink:
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

La lecture d’une bd de Taniguchi est toujours pour moi une manière de sortir un peu du temps, de se poser au calme et de s’imerger dans un monde qui semble révolu tant il parait loin de nos vies actuelles.
L’orme du Caucase ne déroge pas à cette règle, ces huit nouvelles superbement illustrées nous plongent dans ce japon fait de traditions et de valeurs tels le respect, la pudeur et la retenue. Et c’est bien cela qui fait que cette lecture est apaisante, la pudeur et la retenue, pas la peine de trop en dire, de trop en faire, les choses se lisent sur les visages et dans les gestes des personnages.
Chaque nouvelle est une réflexion sur le temps qui passe, sur nos choix de vie, sur les regrets qu’on peut avoir par rapport à nos actes ou aux mots que nous avons prononcés. Des thèmes qui renvoient à notre propre vie et qui sont chers à Taniguchi qui a trouvé en Utsumi un auteur à la hauteur de son talent. Une bd à lire cet été à l’ombre d’un grand arbre (et pourquoi pas d’un orme) en se laissant aller à la langueur de ce temps qui passe.
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Je remonte ce topic pour une simple et bonne raison!

il vient d'être élu par l'équipe des chroniqueurs du site "coup de coeur/foudre" enfin bref "BD préférée" durant la période du 15 juin au 15 Juillet...

il s'agit pour nous en dehors des chroniques de chacun de dégager tout les mois un album qui a fait l'unanimité (ou presque laugh.gif ) parmis nous!
en gros de vous dire...si vous ne pouvez vous offrir qu'une bd pendant le mois, s'il y en a 1 seule à lire
c'est celle là!

voilà on attend vos réactions!
en attendant bonne lecture à vous,
...
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 2 weeks later...
Ca y est je l'ai lu hier et ...............qu'est ce que ca fait du bien biggrin.gif
On se sent bien apres avoir lu ces histoires, vraiment. Toutes remplies de profondes gentillesse, de bonheur, de reaction inattendu......

Je ne serais que le conseiller au gens qui ont ne serait ce qu'un petit coup de deprime.....

Une reve a l'état solide :ange:
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 5 months later...
Je remonte ce topics, car je viens de lire l'orme du caucase. Et encore une fois tanigushi ne me décoit pas. Et pourtant j'en attend beaucoup à chaque fois. Je ne pourrait prendre le temps aujourd'hui de dévellopé mon avis, j'espere le faire plus tard, mais je voulais juste exprimé le bonheur que l'on ressent à lire ces 8 nouvelles, traité avec finesse et pudeur, provocant de fortes émotions sans être "tire-larmes" et offrant au lecteur la possibilité de médité ensuite, lentement, surement sur ce qu'il vient de lire. Car encore une fois, tanigushi est loin, même très loin de faire une bd vide de sens. Le dessin est toujours aussi merveilleux, et le choix du scenariste toujours aussi réussi ( d'ailleur j'aurait voulu savoir, tanigushi à adapté les nouvelles de utsumi non? J'ai l'impression que comme avec le sommet des dieux, le scenariste est l'auteur d'un roman, ou ici de nouvelles, qui ont été adapté sous forme de manga par tanigushi, je me trompe?).
Merci encore Mr tanigushi biggrin.gif
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Rejoindre la conversation

Vous pouvez publier maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous avez un compte, connectez-vous maintenant pour publier avec votre compte.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

 Share

×
×
  • Créer...